La campagne des municipales à La Réunion se jouera sur le terrain de la xénophobie et des fausses informations, relayées, parfois, par des médias qui ont choisi leur camp. Electeur, tu vas devoir être malin.
C’est parfois en fouillant dans nos propres archives qu’on retombe sur de sacrées perles. Celle ci-dessous, dans une enquête sur la défaite au premier tour de Ericka Bareigts aux régionales, rappelait un fait divers aux apparences anodines : un ralé poussé en centre-ville entre un commerçant et un homme portant un t-shirt aux couleurs de la ville de Saint-Denis, banal tohu bohu monté en épingle par des médias réputés proches de l’adversaire de Bareigts à Saint-Denis et aux régionales, Didier Robert.
La maire du chef-lieu semble avoir appris de ses erreurs : la mairie achète désormais des espaces publicitaires au tout nouveau JIR Hebdo, qui semble l’épargner depuis son arrivée dans les kiosques, ouvrant toutes grandes ses pages à son poulain Rémy Bourgogne, sans doute candidat à la mairie de Saint-Louis en 2026.
C’est un fait : les futurs candidats pourront compter sur des relais médiatiques, récents ou anciens. Au Port, Olivier Hoarau peut se réjouir du le relais du moindre de ses communiqués sur Imaz Press ; au Quotidien, bien que le journal se soit défendu auprès du Tangue de toute ingérence, sévit une journaliste qui a été candidate suppléante de David Lorion, désormais maire de Saint-Pierre et président de la CIVIS.
Au JIR Hebdo, le rédac chef a été dircab de Richard Nirlo à Sainte-Marie, est la compagnon d’une des cheffes de file de la droite à la Région, quand le grand patron a grenouillé avec une bonne partie de la droite locale lors des dernières sénatoriales. La liste pourrait être longue, si nous nous amusions à recenser tous les petits arrangements en sous-mains entre médias et politicards, souvent dans le dos des lecteurs, favorisant ici et là l’achat d’espaces publicitaires.
Conséquence ? Le relais, souvent sans contradiction, des théories les plus fumeuses de nos candidats pas encore déclarés, mais qui peinent à cacher leur désir d’écharpe tricolore. C’est aussi, surtout, là que vont se jouer les municipales de 2026 : la soi-disante insécurité qui règnerait sur l’Île. Pour celleux qui souhaitent faire tomber l’édile actuel, il ne s’agirait plus uniquement, comme les années précédentes, d’aller mettre la pression sur les agents municipaux, forts pourvoyeurs en voix, ou sur deux ou trois familles influentes de la commune, mais bien d’assurer que le bordel règne dans la commune, puis que c’est la faute au maire, et d’utiliser médias et réseaux sociaux pour le faire savoir.
La semaine dernière, c’est avec délice que Le Tangue s’est entretenu avec Gilles Hubert, sans doute futur candidat à La Possession, qui insiste sur un “sentiment d’insécurité” qui règnerait sur la commune, alors que les faits disent le contraire.
C’est, encore, la stratégie des Céline Citouze ou Jean-Hugues Ratenon, qui moulinent sur le thème de l’insécurité, obligeant, du coup, les maires actuels à surenchérir. Au lieu de retomber, la mayonnaise monte, monte.
Aujourd’hui encore, c’est Nathalie Bassire, sans doute future candidate au Tampon, qui nous parle d’une “insécurité grandissante du fait notamment d’un essor préoccupant de la délinquance.” Ce que nous avons vérifié, encore et toujours, et qui est complètement faux, au Tampon comme ailleurs presque partout dans l’Île sur ces dernières années.
Derrière les délires sur la délinquance, les vrais chiffres, par commune
Au Tampon aussi, la surenchère s’annonce corsée : face à Bassire, Patrice Thien Ah Koon, proche de l’extrême-droite, annonce déjà, dans le dernier JIR Hebdo, la couleur : pour lui, la droite a “voulu faire du politiquement correct“. Quand on voit à quel point les LR se sont rapprochés des idées du RN, on se demande bien ce que c’est, le “politiquement correct“…
Plutôt maires que Front Populaire : ces politiques qui préfèrent collaborer
Comme nous l’avions écrit lors de l’entre-deux tours des législatives de 2024, si la confusion règne bien à droite et à gauche, c’est bien chez les premiers que les offensives xénophobes et à base de fake news vont se faire les plus prégnantes. D’abord car une bonne partie a décidé de soutenir, la semaine dernière, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau aux élections à la présidence des Républicains. Un ministre réactionnaire, qui explique lui-même partager une grande partie du programme du Rassemblement national, visé récemment par une plainte de la Ligue des Droits de l’Homme pour ses discours anti-immigration.
Localement, à part sur La Plaine-des-Palmistes, le RN ne semble pas en mesure de remporter la moindre mairie ; mais comme Le Tangue l’a déjà analysé, l’électorat raciste est désormais bien ancré dans l’Île. La droite – et certains candidats de gauche – n’a donc plus qu’à surfer sur une vague xénophobe qu’elle va s’atteler à faire gonfler ces prochains mois, évidemment en inventant ou en grossissant des faits divers ponctuels. Ces dernières semaines n’ont été qu’un amuse-gueule. Miam miam.
La rédaction du Tangue
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