Une histoire de vagues

Deuxième, première vague ? Si les chiffres sont impressionnants, ils ne traduisent pour l’instant pas un problème sanitaire majeur. On ressort nos petits graphiques.

 

Si on se cantonne au nombre de nouveaux cas positifs au Sars CoV-2 de ces derniers jours, c’est sûr que ça fait flipper : depuis la découverte d’un premier cluster à Saint-Denis, le 11 août, une nouvelle “vague” de cas est arrivée sur La Réunion. Sans réel “pic”, pour l’instant, car nous n’avons pas encore assez de recul pour savoir si l’augmentation, en une journée, de quatre-vingt-douze cas le 23 août en était un ou pas.

Cette augmentation est visible sur le nombre de cas totaux, ci-dessous (Le Tangue ne prend toujours pas en compte les cas positifs comptabilisés par l’ARS dans le cadre des évacuations sanitaires).

 

Evolution du nombre de cas positifs au Sars CoV-2 à La Réunion

 

Pour l’instant, le fameux “plateau”, signe d’un ralentissement de la progression de l’épidémie, est loin d’être visible. Si on se penche sur le nombre de nouveaux cas journaliers, celui que Le Tangue s’évertue à considérer comme le graphique le plus intéressant, on constate qu’il s’agit bel et bien d’une deuxième vague. Certes, plus importante.

 

Evolution du nombre de nouveaux cas positifs journalier au Sars CoV-2 à La Réunion

 

Le première vague avait duré environ une vingtaine de jours, avec un pic à trente-huit nouveaux cas. Celle que nous vivons actuellement devrait durer un peu plus longtemps, et concerner beaucoup plus de gens.

Faut-il s’inquiéter pour autant ? Pas encore. Mais faut faire gaffe. Car il n’est pas possible d’attribuer uniquement cette hausse du nombre de cas à un plus grand nombres de tests. S’ils sont certes en très forte augmentation – leur nombre hebdomadaire a doublé depuis la fin du confinement – ils trouvent, de plus, un plus fort pourcentage de cas positifs. Le taux de positivité est en effet de 1,9%, quatre fois plus important qu’il y a deux semaines. Ce taux de positivité est la preuve ultime que le virus circule à La Réunion, ce qui n’étonnera pas les lecteurs du Tangue.

 

Source : Santé publique France

 

Ce taux est toujours largement en-dessous du “seuil de vigilance”, il n’y a donc pas péril en la demeure.

Mais plus encore : les indicateurs susceptibles de témoigner d’une réelle crise sanitaire sont ceux concernant les hôpitaux. Rappelons, en effet, que c’est la surcharge des établissements de santé qui a provoqué, dans le monde entier, les flambées de décès. Or, différents chiffres sont rassurants. Le nombre de passages aux urgences, par exemple, de personnes en détresse en respiratoire, à La Réunion.

 

Source : Santé publique France

 

On voit bien que sur ce domaine précis, il y a eu une vague en mars-avril, pas cette fois-ci. Cela traduit donc un fait : le taux de cas asymptomatiques est bien plus élevé aujourd’hui : les gens sont porteurs, pas malades.

Cela se confirme avec le chiffres des hospitalisations (hors réanimation) : il a beaucoup moins augmenté que celui du nombre total de cas.

 

Evolution du nombre de personnes hospitalisées (hors réanimation) pour une infection au Sars Cov-2 à La Réunion (Evasan compris)

 

Il est même, pour l’instant, inférieur au “pic” du mois d’avril. Si les hôpitaux, à l’époque, n’ont pas été surchargés par le Covid – même si le confinement leur avait aussi fait diminuer leur charge de travail habituelle – ce n’est donc toujours pas le cas.

De même, le nombre de personnes en service de réanimation n’a pas évolué dans les grandes largeurs. Ou presque.

 

Evolution du nombre de personnes hospitalisées en réanimation pour une infection au Sars Cov-2 à La Réunion (Evasan compris)

 

Dans ces deux derniers graphiques, nous avons compté les personnes soignées issues d’évacuations sanitaires, puisqu’elles occupent bel et bien des lits ici, et qu’il s’agit ici de se pencher  sur un éventuel débordement des services de santé. Ce qui n’est pour l’instant pas le cas, La Réunion ayant augmenté sa capacité d’accueil de cas graves depuis quelques mois.

Pour résumer, ces chiffres montrent surtout que la flambée du nombre de cas ne se traduit, pour l’instant, pas du tout par une crise sanitaire. Parmi les raisons évoquées, que Le Tangue a pu se faire confirmer, une population réunionnaise très jeune, donc moins susceptible de tomber malade, qui se protège moins que les plus âgés. La réouverture de l’aéroport, évidemment, et un relâchement dans les contrôles dans les jours suivant les arrivées, permettent encore de diffuser le virus au sein de la population. Et de la chance, encore et toujours, et pas seulement parce qu’une seule personne est décédée directement du Covid : le jour où le virus arrivera au sein d’une population à risques, c’est bien le nombre de malades, qui va exploser, et pas seulement celui du nombre de cas positifs. Ce serait pas mal qu’on commence à penser aux petits vieux. Les acteurs du monde économique en premier lieu, qui n’ont pas l’air d’avoir compris le problème.

Loïc Chaux