Le Tangue, personne veut lui parler

À La Réunion, les services de com’ semblent vouloir nous ignorer. Une tactique qui, au lieu de nous gêner, nous remplit d’allégresse. Sans rire, on adore.

 

Il ne vous aura pas échappé que, régulièrement dans nos enquêtes, nous vous précisons, chers lecteurs, qu’untel “n’a pas souhaité répondre à nos questions.” C’est pas pour vous décrire précisément nos arrières cuisines, mais quand même, cet édito tient à revenir sur cette énigmatique phrase qu’on écrit – bien trop – souvent.

La première fois qu’on nous a fait le coup, c’est lors de notre enquête sur le compte en Suisse de Jean-Luc Poudroux. Nous avions alors contacté sa collaboratrice qui, après nous avoir demandé qu’on lui envoie nos questions par mail, ne nous a finalement jamais répondu. Une fois le papier sorti, et au vu du caca que cela a provoqué, le Jean-Luc a dû convoquer une conférence de presse pour – enfin – répondre. Nous prenant à part, la conseillère nous a affirmé qu’elle n’avait pas voulu “ne pas nous répondre“, Poudroux assurant “ne pas avoir eu le temps“. Ce qui, à l’époque, ne l’avait pas empêché de contacter des confrères le jour de la parution de nos articles pour réagir. 

Et puis il y a La Région. Alors, là-bas, c’est pas compliqué : ils ne nous répondent même plus. Le téléphone de la com’ sonne dans le vide, on ne répond jamais aux mails. Elle nous a notamment fait le coup pour l’histoire des permis de conduire : coups de fil, mails, et même rencontre de visu lors d’une assemblé permanente… L’aréopage de communicants du Moufia est semble-t-il trop débordé pour répondre au Tangue et à ses lecteurs. Tiens, d’ailleurs, la semaine dernière, on avait deux-trois questions sur le feu, eh bien, on attend toujours.

Il n’y a pas qu’eux : le Département non plus, ne nous répond pas ; les personnes qui apparaissent dans les Swissleaks, et que nous avons essayé de contacter font aussi les morts ; Stéphane Bijoux, par le biais de son comité de soutien, a lui aussi préféré le silence ; et vous allez ces jours prochains apprendre encore qu’une mairie d’une ville du Sud nous a aussi baladés bien correctement. Vu l’enquête sur laquelle nous travaillons depuis plusieurs semaines, vous allez bien voir que c’est assez croustillant.

Vous allez croire que sur ce coup-là, Le Tangue est chafouin. Ce serait bien mal nous connaître : au contraire, on adore. Reprenons le cas “Poudroux”. Si on a essayé de contacter ce brave Jean-Luc, ce n’est pas pour lui demander des infos ; on les avait déjà. C’est surtout par déontologie – Oui, au Tangue, on aime bien les gros mots : il nous semblait évident de lui laisser une chance de s’expliquer, et de se défendre.

Dans la plupart des articles que nous écrivons, nous n’appelons pas les personnes concernées pour qu’elles nous donnent des informations, ça, c’est notre boulot de les trouver. C’est surtout pour qu’elles puissent répondre à des accusations auxquelles elles n’auraient pas, déjà, répondu. Parfois, aussi, pour en vérifier quelques unes. Dans ce cas-là, inutile de préciser que, de toutes façons, la vérifications passera par d’autres sources.

Nous expliquons cette tactique-là par deux raisons. La première, c’est qu’on prend Le Tangue pour des petits rigolos – ce que nous sommes – et que nos papiers sont encore lus par un public confidentiel, et qu’on ne mérite pas d’avoir des réponses. C’est vexant, mais, après tout, pas vraiment faux. 

La deuxième, c’est que nos interlocuteurs pensent qu’en ne nous répondant pas, ça va se tasser, et on va passer à autre chose. Et c’est là qu’on adore : pour nous, une “non-réponse” apporte autant d’information que si on nous avait répondu. Ne pas vouloir répondre sur un sujet précis, sur des questions précises, c’est à nos yeux l’aveu d’un certain sentiment de malaise face à nos interrogations. Et comme on essaie de jouer la transparence auprès de nos lecteurs, nous ne nous priverons pas de les informer, quand c’est le cas, de cette volonté délibérée de ne pas répondre à nos questions. C’est pas pour vous donner des cours de com’, hein : mais sur le long terme, cette tactique risque de ne pas être très productive.

Le Tangue

 

P. S. : À part ça, les élections européennes, on s’en fout pas mal.

P. S. 2 : Abonnez-vous !